• C'est ALLO?WIN, ce soir...

    N'oubliez pas de sortir vos POTIRONS !

    Les POTes IRONt y boire la soupe... olé !

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  • (...) Sur le coup de vingt-trois heures, dans un Night Shop où mes lèvres desséchées avaient guidé mes pas, et tandis que j'attendais impatiemment dans la file de payer une misérable canette de limonade, la silhouette cambrée d'une gamine d'une vingtaine d'années qui s'appuyait avec nonchalance contre le comptoir bondé réveilla d'un seul coup mes sens que j'avais pourtant pris soin d'émousser depuis quelques jours.


     



    De face, la ressemblance me semblait moins flagrante, mais, comme Juliette, elle portait au poignet une fine chaînette dorée attachant un prénom écrit en lettres cursives. Ni moi, ni la police n'avions retrouvé le sien aux alentours immédiats du lieu où s'était déroulé le drame.



     



    Je lui emboitai le pas en demeurant à distance respectable. Elle alluma une cigarette et je tentai vainement d'en renifler la fumée dans le vent. Ses talons, plats et ferrés à l'arrière, cliquetaient nerveusement sur le pavé, le bas de sa robe légère battait à mi-cuisses sous sa veste courte et je me régalais à la vue du slip qui transparaissait délicatement sur le tissu.



     



    Elle marchait à si belle allure que je fus forcé d'adapter mon rythme au sien. Aussi, cela lui devint bientôt manifeste que je la pistais et, d'ailleurs, après un regard fugace et inquiet quant à mes intentions, elle accéléra le pas davantage. Ses enjambées tourmentées faisaient ridiculement rebondir sur sa hanche un sac auquel elle semblait s'accrocher comme à une trousse de secours. J'étais certain qu'elle s'interdisait, non sans difficulté, de paniquer et se mettre subitement à courir.



     



    Je me demandais si, l'an dernier, Juliette avait éprouvé autant qu'elle la sourde terreur qui escaladait à présent l'échine de cette fille quand, soudés à quelques mètres l'un de l'autre, nous sommes enfin arrivés au bas d'un immeuble dans lequel elle s'engloutit en jetant derrière elle un ultime coup d'œil de soulagement.



     



    Je suis entré précipitamment à sa suite. Elle fouillait hystériquement son sac en quête d'une clef salvatrice. « Vous ne devriez jamais sortir seule à une heure aussi tardive ! », lui conseillai-je à voix basse en lui posant une main paternelle sur le bras.



    Bouche bée, la jeune femme écarquilla des yeux affolés. Je lui arrachai son sac avec autorité pour y dénicher moi-même les clefs puis, piloté par une excellente intuition, je lui ouvris la porte au tout premier essai, la poussant ensuite vers l'intérieur. Elle fut agitée de tressaillements irrésistibles et sa chair toute entière, frissonnant en diable, me parut soumise et consentante à tout outrage que je lui imposerais, pourvu qu'elle y sauvât tout au moins sa peau.



     



    L'an dernier, me disais-je avec certitude en guidant de force la jeune fille par le bras en direction de l'ascenseur, Juliette avait connu un sentiment d'épouvante fort similaire à celui dont je vivais à présent, par procuration de cette fille effarouchée, la lente et sournoise progression.



     



    Soudain, je la lâchai, comme j'aurais tant aimé qu'on eût lâché Juliette, et lui rendis son sac qu'elle accepta maladroitement entre des mains tremblantes.



     



    En guise d'adieu, je m'emparai avec douceur de son poignet pour y lire le prénom attaché par la chaînette, avant de lui ébaucher un geste tendre de l'index sur l'arête du nez. (...)



     



    Extrait de « Moeur's frisson », roman.


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  • Parfois, elle avait l'impression qu'il la considérait comme une sculpture érotique parmi les autres objets décoratifs de l'appartement, surtout lorsqu'il semblait soucieux ou amer, jeté comme une loque sur un fauteuil, ce qui lui faisait alors ôter ses lunettes en laissant errer tout autour d'eux un regard myope et vide pendant plus d'une heure parfois.

    Sa transe figée s'achevait invariablement par le même scénario : il s'arrachait soudain d'un bond de son siège de velours pour leur servir à tous deux un whisky bien tassé et, comme s'il découvrait enfin que la patiente odalisque était aussi faite de chair et de sang, en entreprenait l'assaut sur le champ, d'une paume lui ravageant les seins, d'une bouche gourmande sur ses lèvres ou d'un double-doigt inquisiteur qui la limait entre les cuisses.
    Généralement, Blandine était plus que consentante car elle était elle-même friande des variantes amoureuses les plus ingénieuses, les plus incongrues que Gabriel parvenait à inventer à ces moments-là.



    Mais, avant-hier, elle avait ressenti pour la première fois une lassitude qui lui avait fait adopter cette attitude froide : de fait, elle était vraiment devenue un bas-relief grandeur nature d'une femme debout, aux deux bras appuyés contre le mur, les cuisses en triangle équilatéral et dont la croupe merveilleusement taillée à même le marbre serait souillée par un vandale iconoclaste.
    Il n'avait guère trouvé étonnant qu'elle restât aussi immobile et imperméable car cela faisait partie de leurs jeux, rien de particulier sinon peut-être que les bouts de ses seins n'avaient eu aucune érection.
    Il avait éjaculé sans davantage de réflexion dans l'étroite rainure de ses fesses.
    Mais il ne vit pas la moue de dégoût qu'elle adressa aux murs devant elle.



    Extrait de « Paquebot en cale sèche », roman


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  • Les deux derniers piliers qui s'incrustaient au comptoir ont enfin décidé de lâcher prise. Vu leur état d'ébriété, c'était peut-être leur seule décision raisonnable de la soirée. Ma call-girl a jeté un regard sur sa montre-bracelet en leur disant au revoir sans même quitter mes genoux pour aller vérifier la monnaie qu'ils avaient déposée sur le comptoir. « Attends ! », gémit-elle en repoussant ma main envahissante.
    Elle est allée fermer la porte du Bruxelles-Texas à double tour. Mon angoisse est montée instantanément quand elle a rabattu les tentures aux vitrines. Chez moi, j'avais aboli les voilages aux fenêtres depuis longtemps.
    Je n'eus droit à aucun commentaire à propos de Sophie et je laissai prudemment le sujet de côté. Pour l'heure, je préférais la laisser m'entraîner sur le tapis vert du snooker.
    Je lui ai baissé le short jusqu'aux chevilles et, agenouillé entre ses cuisses, lui ai d'abord fait consumer trente-six chandelles à petits lapements au travers du fin tissu de son slip. Quand ma langue a ensuite enflammé son sexe à vif, elle a aussitôt brûlé comme une torche, les seins gonflés sous mes paumes glissées sous son chemisier, les fesses durcies et les muscles qui raidissaient ses jambes comme des chevrons de bois appuyés sur mes épaules. « Viens ! Viens ! », gémissait Roxane avec banalité, en ruant subitement sous l'emprise d'un orgasme inextinguible.

    (...)

    Je l'ai invitée chez moi. Roxane s'était finalement écroulée, les bras et les jambes en forme de croix au centre de laquelle palpitait encore son sexe comme la gueule d'une grenouille. Je n'assurerais plus guère une résurrection de sa part. Aussi, je me glissai dans mon bureau, ce qui était sensé signifier aux femmes que, outre mes qualités libidinales, j'étais également doté d'un cerveau.


    « Je te dérange ? Tu dormais, Comtesse de Ségur ? »
    « ... Pas vraiment. Dis, Jules Verne, elle fait un peu pute, ta nouvelle copine, non ? »
    « Comtesse, Comtesse... Cela me trouble davantage lorsque vous me vouvoyez, le saviez-vous ? »
    « ... »
    « Hier, je me suis branlé... Je n'imaginais pas que Britney Spears ou Mandy Moore pouvaient autant m'inspirer... Tu t'en doutais ? »
    « ... Un peu. Apparemment, les viandes faisandées s'accommodent bien de la chair fraîche. Moi, je me suis grattée en pensant à David ! »
    « Merci pour la recette de cuisine... David, c'est ton copain ? »
    « Putain, je parle d'Hallyday... Ne me dites pas que vous êtes réellement branché sur moi... Et le fantasme, bordel ! Y a quand même un paquet de top model, de chanteuses ou d'actrices un peu bandantes, non ? Vous n'en connaissez aucune à part la Spears, ou quoi ?»
    « Si. Ca me sert pour le casting de mes bouquins... »
    « ... Alors, allez, choisissez-en une au hasard, une qui vous fait bien saliver, Jules... »
    Je suis tombé sur Mena Suvari.
    « Pas mal, pas mal ! Une vraie beauté américaine ! J'aime... »


    J'avais une sacrée envie de poursuivre notre conversation mais j'ai adopté d'urgence un autre ton : « Bon, eh bien, à plus tard, Comtesse, je te recontacterai...  ». Roxane, les yeux gonflés et les seins sur les genoux, venait d'apparaître dans l'embrasure de la porte.
    « Où est-ce qu'on pisse chez toi ? Dans l'évier de la cuisine ? », marmonna-t-elle dans son demi-sommeil.
    J'entendis l'urine couler dans le fond d'eau. Je me suis dit qu'une femme qui montre autant d'intimité à son amant est une femme qui en cherche un autre, ou qui en a une flopée en réserve. Lara Croft, collée au mur d'en face, devait sans doute se rincer l'œil mais elle n'était pas femme à gloser les événements
    « C'était qui, pour te sonner à une heure pareille ? », demanda le squelette de Roxane, perché sur la cuvette.
    « Mena Suvari, tu sais, la Lolita d'American Beauty. Elle revendique le premier rôle dans mon prochain roman... », rétorquai-je non sans moquerie.
    « Très drôle ! Je ne savais pas qu'elle était Comtesse ! », commenta Roxane en lâchant un petit pet sifflant qui embauma illico tout l'appartement.

    J'ouvris grand la fenêtre du bureau. Tout se terminait avec une bête histoire de porte ouverte qui se refermait sur notre histoire, à Roxane et moi.


    Extrait de « INSECTUEUSE », roman 2001


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  • © Michel CORBOZ

    Une casserolée de moules provoque toujours en moi un désir purement sensuel, exacerbé par leur odeur marine, le luisant noir et glabre des bivalves délicatement écartés, la tendre mollesse de la chair entre les doigts, le muscle qui s'abandonne sur la langue et entre les dents, et même le délicat cliquetis de la coquille vide qui tombe dans le couvercle. C'est indescriptible : un je ne sais quoi d'érotisme et de pornographie à la fois. Le « r » des mois concernés m'inspirent à « r »ééditer inlassablement ces instants d'orgasme.
     
    Malheureusement, cette année, la date d'arrivée sur le marché fut retardée jusqu'au mitan du mois d'août et, bien entendu, le lobby de mytiliculteurs hollandais, prétextant ensuite jouer avec l'offre et la demande, s'était autorisé une fameuse flambée des prix. Toujours fut-il que ma précieuse masturbation devenait réellement hors de prix. Aussi n'en mangeai-je que très exceptionnellement cet été, ne partageant ma gastronomie perverse qu'en compagnie de l'une ou l'autre jeune femme enlevée au hasard de mes errances affectives. Et encore fallait-il que la donzelle appréciât non seulement ma compagnie, mais encore celle du mollusque.

    Aussi la saison des moules me fut-elle brève, trop brève.
    Il y eut Ingrid, son corps osseux et sa peau flasque comme les restes d'un poulet, Ingrid et sa singulière obscénité : me déglutir dans l'oreille une phrase du genre « Prends-moi la moule, chéri ! » ne me titillait guère la libido.

    Il y eut aussi Claudia, sa pilosité abondante, ses seins pas plus épais qu'un coquillage et son accent si prononcé : à force de chevaucher les u par ou, elle avait cru que moule se prononçait mule et cela ne m'avait pas davantage fait pétiller de m'imaginer savourant une cuisse de mulet en pleine cordillère des Andes.

    Il y eut encore Héloïne (Héloïne !), ses longs cheveux teint de noir corbeau, ses ongles démesurés et son petit monstre à quatre pattes qui gobait les moules qu'elle lui jetait comme une vulgaire boulette de pâtée en boite.

    Il y eut enfin Kim, ses hanches rondes, ses cuisses puissantes, son buste étroit, ses seins discrets mais fermes, ses lèvres larges, ses cheveux bouclés plus blancs que blonds, ses vastes yeux bleus, son rire, son sens de la répartie, bref, tant et tant de merveilles que j'en oubliai qu'elle détestait les moules, les crevettes roses autant que les grises, les escargots, les cuisses de grenouilles, les criquets et autres bestioles du genre.

    Je n'étais plus tombé amoureux depuis belle lurette.

    Ingrid avait été un pétard humide qui n'avait produit en moi aucune vraie étincelle, Claudia, malgré son tempérament de feu, ne m'avait guère mieux allumé et Héloïne, avec sa froideur toute aristocratique, avait fini par me glacer par induction.
    Avec Kim, ce fut par contre un feu d'artifice dès notre toute première rencontre. 

    Et pourtant, nous nous étions tous les deux trompés d'histoire d'amour.


    extrait de « Les moules », nouvelle 2001



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